Sous-traitance en Maintenance: les règles de l'art
Le Responsable Maintenance se pose un jour ou l'autre, dans son Entreprise ou son usine, les questions suivantes au sujet de la sous-traitance de certaines activités de son secteur :
- que puis-je sous-traiter dans mes activités ?
- que dois-je absolument conserver et ne pas sous-traiter ?
- comment bien sous-traiter ? Quelles sont les règles de l'art en la matière ?
- comment bien définir mon besoin, pour avoir des coûts les mieux définis et les moins élevés ?
- comment mesurer et comparer les performances (en qualité, en coût, en compétence...) ?
Essayons alors d’y apporter quelques réponses et quelques conseils.
1- RAISONS DE SOUS-TRAITER
Dans une entreprise, dans une usine, les raisons d’une sous-traitance d’activités de maintenance sont multiples. On peut en citer quelques-unes :
- Assistance Technique (ex: pendant la montée en cadence de nouvelles installations).
- Flexibilité ou contraintes (compétences d'appoint, adaptation à la demande du marché) , organisation ( 2x8 , 3x8) , démarrage usine nouvelle ).
- Aide pour installations spécifiques, pointues- Expert haute technicité (compétences difficiles à acquérir ou à maintenir, faible nombre d'installations).
- Activités spécifiques dont la fréquence est trop faible pour justifier l'entretien de compétences.
- Activités répétitives à faible valeur ajoutée en compétence (ex : réparations, nettoyage bureaux et abords, entretien pelouses...).
- Activités trop éloignées des métiers pour y être intégrées- recentrage sur le coeur du métier (ex : laser).
- Contraintes réglementaires (appareils de levage, de lutte contre incendie, accumulateurs ...).
- Coût externe inférieur à coût interne - Pour améliorer la productivité opérationnelle, les ratios économiques.
- Globalisation d'activités (ex : réparations) - Lots groupés multi-techniques.
2- NE PAS SOUS-TRAITER
Mais attention, dans une entreprise toutes les activités de maintenance ne sont pas sous-traitables. Le responsable de maintenance doit à chaque fois que le cas d’une sous-traitance est envisagé, se poser la question : cette activité-là peut-on la soumettre à un intervenant extérieur ? Quels en sont les risques ?
Citons quelques exemples d’activités à NE PAS sous-traiter :
- Le suivi permanent du processus industriel.
- La maintenance des installations critiques, stratégiques pour le process (maîtrise des opérations)
- L'auto-maintenance TPM : maintenance autonome : nettoyage - interventions et préventif niveaux 1 et 2. Elle doit rester aux opérateurs de fabrication.
- Le savoir-faire (« le core business »), l'expertise, les filières Métiers.
- Les tâches qui contribuent au maintien des compétences (ex : automatisme, robotique …).
- Les activités qui garantissent à tout moment la sureté d'une installation.
- Le pilotage de la fiabilisation, des améliorations, des actions de progrès (capitalisation) qui doit être animé et réalisé en interne.
- L'encadrement, le pilotage, le suivi des travaux : planification, ordonnancement, conduite des opérations de maintenance.
- Les méthodes maintenance, l'ingénierie Maintenance centrale usine.
- Le pilotage des systèmes d'infos maintenance.
- Garder la maîtrise d'ouvrage de toutes les activités, la coordination des intervenants.
- Quand il y a une disponibilité de ressources internes (ex: utilisation du personnel à aptitude réduite dans un atelier de réparation).
- Si le coût externe est supérieur au coût interne.
3- LES RÈGLES DE L'ART
3-1 PRÉPARATION :
a) Réaliser un cahier des charges bien défini, validé par l'exploitant (le client) - avec les derniers alignements techniques.
Il faut absolument réaliser, au sein d’une entreprise , un cahier des charges type qui sera le support standard utilisé par tous les acteurs de maintenance qui ont à passer un marché, qui permettra de définir correctement les prestations attendues et les objectifs à atteindre et de ne pas oublier des précisions ou des thèmes à aborder, et d’une manière identique pour tous les fournisseurs consultés (le cadre de réponses rendra plus facile les comparaisons).
b) Prévoir pour les contrats supérieurs à 1 an, une clause de productivité annuelle, quantifiable (hors formule théorique).
c) Prévoir des contrats avec clause de réversibilité (avec préavis de 3 mois).
d) Prévoir des contrats avec accord de coopération (durée, renouvellement, bonus / malus, productivité ...) - objectifs de progrès partagés.
La motivation du fournisseur de prestations de maintenance sera d’autant plus importante que la coopération proposée est du type « gagnant-gagnant », que les objectifs (atteignables) sont récompensés s’ils sont tenus. La confiance mutuelle (« carte sur table ») est alors fortement souhaitable.
e) Prévoir des contrats pluriannuels, de durées les plus longues (3 ans et plus).
Les durées longues permettent de négocier plus efficacement les marchés et les contrats, aussi bien pour les fournisseurs que pour les demandeurs. Par contre un fournisseur qui ne donne pas satisfaction sera plus difficilement exclus et son contrat interrompu (sauf si les critiques et les causes d’insatisfaction sont flagrantes, démontrées, quantifiées).
f) Être financièrement acceptable : Rentabilité des coûts (les plus globaux) de sous-traitance.
Il est souvent difficile de comparer des solutions de maintenances sous-traitées par rapport à des maintenances assurées en interne car on risque d’oublier dans les chiffrages des coûts indirects (ex : l’énergie, certains outillages spécifiques nécessaires, des manutentions, des pièces de consommation, des surfaces de stockage, des prestations complémentaires ponctuelles d’autres intervenants…).
g) Transformer des coûts fixes en coûts variables.
3-2 CONSULTATION :
Quelques règles sont à appliquer avec rigueur :
- Globaliser par métier, par technologie, par site ...
- Réduire le nombre de sous-traitants prestations multi-techniques.
- Exiger une qualité des Prestataires : Professionnalisme et stabilité, compétence des intervenants, maîtrise d'œuvre.
- S'assurer d'une adaptabilité satisfaisante aux évolutions de périmètre, de volume, d'organisation, de technologie.
- Imposer une obligation de résultats quantifiables, mesurables (critères de réception).
- Identifier des indicateurs contractuels de résultats : fiables, utiles, agréés par tous les acteurs, pertinents quant au besoin industriel.
- Responsabiliser le prestataire sur le volume de production du site.
- Donner de la visibilité aux prestataires pour qu'ils soient aussi une force de proposition.
- Respecter la confidentialité d'échange, en consultation, et la confidentialité Produit après la commande.
3-3 MISE EN ŒUVRE :
- ) S'assurer que les dossiers machines sont accessibles et complets : documentation, historiques, nomenclatures, pièces de Rechange.
- ) Garder la maîtrise de l'audit - Exercer des contrôles pour dégager des axes de progrès ou se remettre en question.
- ) S’assurer de la mise en place d’indicateurs fiables et objectifs, permettant l’évaluation des prestataires.
- ) Limiter au maximum les interventions de la maintenance interne après passage des prestataires extérieurs
- ) Réceptionner les travaux (jalons définis en contenus et respectés en délais), éliminer les contentieux par une préparation efficace de ces réceptions.
- ) Organiser des réunions planifiées opérationnelles Production - Maintenance - Prestataire, et leurs suivis.
- ) Organiser des réunions planifiées d'avancement des actions de progrès et de capitalisation.
- ) Suivre l'état des dépenses Pièces de rechange.
- ) Expliquer les raisons de "faire ou faire-faire" au personnel interne dialogue social, transparence…
- ) Assurer une bonne collaboration Achats / services techniques : panel des fournisseurs, Cahier des Charges, durée prestation, contrat, résultats ...
4- REMARQUES GENERALES
Attention à la perte de savoir-faire par sous-traitance - Se recentrer sur les métiers de base.
En phase de démarrage d'une nouvelle usine, la maintenance du process et du patrimoine peut être sous-traitée, avant une reprise en main en interne, progressive et plus ou moins limitée, en commençant par les experts et l'ingénierie maintenance.
Ne pas sous-traiter sans avoir analyser, au préalable, le bon et plein emploi des ressources internes.
5- CONCLUSION
Ainsi comme on peut le voir, la sous-traitance est une activité qui se prépare avec soin. On ne sous-traite pas n’importe quelle activité de maintenance. Et il est toujours impératif de garder en interne des savoir-faire qui valorisent nos professionnels de maintenance, qui font gagner du temps et de la réactivité en cas de pannes, qui réduisent bien souvent des coûts car des intervenants externes de haut niveau ou spécialisés se payent chers.
Enfin, « Ce qui n'est pas défini, ne peut être mesuré. Ce qui n’est pas mesuré, ne peut pas être amélioré » il est donc très important d’intégrer dans les contrats de sous-traitance des performances attendues, qui soient correctement définies et mesurables.
Bonne maintenance
Oliver